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Le Garçon et les Sangsues Affamées
Il était une fois, dans une tourbière très lointaine. Il y avait un étrange petit garçon.
Ce petit garçon aimait toutes sortes d'insectes, des mille-pattes et des scarabées aux cigales et aux guêpes... mais par-dessus tout, le garçon aimait les sangsues.
Sa mère, qui l'aimait beaucoup, était inquiète pour son garçon.
Elle avait tout fait pour le protéger, comme saupoudrer du sel sur le terrain de leur maison et verrouiller les portes pour que son fils ne sorte pas tard durant la nuit.
« Je ne te perdrai pas. » Elle a dit. « Je ne te perdrai pas à cause de ces insectes gluants sanguinaires. »
La mère savait que, tard dans la nuit, les sangsues les plus maigres et les plus affamées s'échappaient de la tourbière et se nourrissaient des cerfs et de tout ce qui se trouvait sur leur chemin. S'il en restait. Pourtant, elle s'est inquiétée pour son fils, comme le font toutes les bonnes mères.
Le garçon avait déjà des problèmes, il sortait pendant la journée pour glisser des tiques et des sangsues sous ses vêtements où elles s'engraissaient de son jeune sang. Sa mère commençait à en avoir assez de les arracher de ses jambes cicatrisées et de son petit ventre.
Une nuit sombre, la veille de la lune de sang, sa mère était particulièrement fatiguée et épuisée d'avoir travaillé au marché toute la journée et avait oublié de verrouiller la porte en allant se coucher.
Le garçon était surpris et plein de joie quand il a trouvé la porte déverrouillée. Il a couru dehors pour trouver le monde noir et les arbres bruyants de toutes sortes de créatures !
Le garçon courait pieds nus dans la tourbière, ses petits orteils s'agitant tandis que les sangsues et les tiques s'accrochaient à sa chair tendre. Le garçon était si heureux de nourrir ses amis les insectes, car il savait que les animaux ne broutaient pas beaucoup dans la région.
« Merci, jeune garçon ! » Les sangsues bavardaient et jacassaient, engloutissant le sang riche du garçon. « Nous étions affamés depuis si longtemps que nous craignions de nous ratatiner sans avoir goûté une seule goutte ! »
Les tiques qui s'accrochaient à son cou et les sangsues sur ses pieds et ses jambes instruisaient le garçon, lui disant de s'enfoncer plus profondément dans la tourbière où il pourrait trouver la Fée des Tourbières qui lui accorderait un vœu.
Et c'est ce que fit le garçon, assez impatiemment, en s'enfonçant dans l'eau agitée qui embrassait sa peau avec des lèvres pincées. L'air autour de lui devenait plus épais et plus lourd dans ses petits poumons.
Bien assez tôt, la vieille fontaine était en vue. Une vieille pierre recouverte de quenouilles et de vignes moussues, brillant dans le peu de lumière lunaire qui pouvait se frayer un chemin à travers le brouillard. « Viens, mon garçon. Viens boire à la fontaine de la tourbière, tu dois avoir si soif. » Ses nouveaux amis, les insectes lui ont dit.
C'était vrai, le garçon était très assoiffé et très fatigué par les sangsues qui se régalaient de son sang.
Alors, le garçon a bu. Il se pencha sur le rebord en pierre de la fontaine presque submergée et avala l'eau.
L'eau était épaisse et grouillante de vie. Au début, elle avait un goût aigre et de terre, mais elle devint rapidement plus douce que n'importe quel bonbon que le garçon n’avait jamais goûté.
Il aurait bu toute la fontaine si un jet d'eau ne l'avait pas surpris.
Assis au centre du jet de la fontaine se trouvait un enfant couvert de vignes moussues, de branches tordues et d'épines qui partaient de ses yeux et s'enroulaient autour de ses cheveux duveteux pour former des cornes au-dessus de lui.
« Quelle curieuse créature tu es. » Dis la Fée des Tourbières qui aurait reconnu le garçon s'il n'avait pas eu des tiques et des sangsues dodues couvrant tout sauf ses yeux.
« Es-tu venue pour un souhait, étrange créature ? » Demanda la Fée.
Le garçon a essayé de parler, mais il a découvert que sa bouche était pleine. Il a regardé pour trouver la fontaine pleine d'insectes sanguinaires et quand il a parlé, il s'est seulement étouffé avec les vers et les scarabées qui s'accrochaient à sa gorge.
Le garçon avait avalé trop de sangsues.
« Oh, belle et séduisante Fée des Tourbières ! » Criaient les insectes depuis l'intérieur et de l’autour du garçon.
« Cet enfant nous a offert un festin de son sang pour que nous ne mourions pas de faim, mais il nous en faudra plus pour l'hiver ! ». Ont-ils crié. « Pourrais-tu lui accorder plus de sang à donner, Fée des Tourbières ? »
La Fée a hoché la tête et s'est mise au travail sur le garçon.
D'abord, la Fée des Tourbières a pris les os du garçon et les a moulés en une statue au bec de la fontaine, faisant couler le sang frais de ses lèvres, des pigments rouge vif aux épais caillots noirs.
Puis la peau et les cheveux du garçon ont été transformés en plantes rose pâle et en fleurs violet clair qui ont entouré le bassin de la fontaine et ont poussé dans les orbites où étaient les yeux du garçon.
Enfin, les organes du garçon ont été transformés en racines et veines rouges qui ont répandu le sang dans toute la tourbière, alimentant en sang rouge et sucré toutes les eaux douces.
À la fin de la nuit, le garçon était une belle fontaine blanche comme les os et le garçon faisait pousser ses fleurs dans les eaux rouges. Les sangsues s'enfonçaient profondément dans la boue pour faire un festin dans l'approvisionnement sans fin de sang avec les tiques et les moustiques.
Et la Fée des Tourbières se baignait dans la fontaine lors de nuits sombres et paisibles, fredonnant la mélodie d'une pauvre âme sanglotant à la lisière des tourbières. Chantant des chansons joyeuses et parlant à la fontaine qui ne pouvait pas répondre.
Et ils vivent heureux jusqu'à la fin des temps.
La Fin.
